10/02/2013

OAF n°5 : Femme migrante, la double violence - Interview de RAJFIRE





Le RAJFIRE, Réseau pour l’autonomie des femmes immigrées et réfugiées, est un collectif féministe qui lutte pour les droits des femmes étrangères, immigrées, demandeuses d’asile ou réfugiées. Il a été créé en 1998 mais fait suite à d’autres initiatives féministes ayant existé antérieurement. C’est une association militante, indépendante de tout parti ou institution.

site internet : http://rajfire.free.fr/

1) Quel regard portez-vous sur les politiques migratoires menées ces 10 dernières années notamment concernant l’accès aux droits des femmes migrantes ?

Claudie : Notre association œuvre pour la conquête de droits. Face au durcissement des politiques migratoires mises en œuvre ces dernières années, nous avons interpellé les gouvernements successifs en vue d’améliorer l’accès aux droits des femmes migrantes exposées à des problématiques spécifiques : violences, dépendance administrative, inégalités sociales, vulnérabilité face à la domination patriarcale.
Nous avons agi en proposant des amendements aux textes de loi et obtenu plusieurs articles favorables à la protection des femmes migrantes victimes de violences conjugales. Le second pan de notre action consiste à veiller à l’application de ces dispositions et l’on ne peut que constater l’arbitraire qui règne dans les administrations françaises. Nous accueillons lors de nos permanences des femmes que nous accompagnons dans leurs démarches afin de faire reconnaître leurs droits, notamment dans l’obtention de titres de séjour. L’engagement juridique aux côtés des femmes migrantes est pour nous une dimension aussi essentielle que l’engagement politique et collectif.

2)Femme et étrangère : une double violence! A partir de la permanence que vous animez tous les mardis de 16 h 30 à 20 h à la Maison des Femmes de Paris pouvez vous nous expliquer cette double violence et les pistes à explorer pour y faire face ?

Claudie : La double violence réside dans l’imbrication de la violence sexiste issue du système patriarcal et de la violence d’Etat à l’encontre des femmes migrantes.  Nous accueillons des femmes victimes de violences conjugales, des femmes contraintes à la prostitution, à l’esclavage domestique, soumises au chantage aux papiers. Face à ces situations dramatiques nous ne pouvons que déplorer l’inaction de l’Etat qui ne remplit pas sa mission de protection et laisse ces femmes en proie aux violences étayées par les discours culturalistes, aux inégalités sociales face à l’emploi, face  à la maitrise de la langue, à la dépendance administrative et à la précarité qui en résulte. Pour y faire face, nous prônons l’accompagnement, la possibilité pour ces femmes de rencontrer des associations d’entraide, de disposer de lieux d’échange.
Il reste beaucoup à faire dans le domaine de l’action politique et collective. Nous avons adressé une lettre ouverte au gouvernement en vue de la constitution d’un groupe de travail transversal placé sous l’égide du ministère des droits des femmes afin de faire avancer des changements pratiques  dans l’aide aux femmes migrantes.