Alors que la loi travail vise notamment
à faciliter les licen-ciements, le patronat et l'État (et leurs
fidèles accompagnateurs des CFDT, CFTC et CGC) s'en prennent
parallèlement à l'assurance chômage, à l'occasion des
négociations de la convention Unedic.
L'article 52 de la loi « travail »
prévoit déjà de renforcer les moyens de flicage des chômeur.euses,
en autorisant par exemple Pôle emploi à ponctionner directement les
supposés trop-perçus, même quand l'erreur est du côté de
l’adminis-tration (laissant à la personne indemnisée le soin de
saisir le juge en cas de contestation).
Deux fronts sont ouverts par le
patronat :
- la réduction du soi-disant « déficit » de l'assurance chômage par la suppression du principe « un jour cotisé, un jour indemnisé » pour moduler ce ratio en fonction du taux de chômage, la dégressivité des allocations, l'allongement de la carence pour les cadres, le relèvement des bornes d’âge de la filière senior, etc. ;
- un acharnement à détruire les annexes 8 et 10 des intermittent.es du spectacle.
De quelques fausses vérités…
L'argument du « déficit »
de l'Unedic est martelé depuis des années pour faire passer toutes
les régressions sociales et le « contrôle » accru des
sans-emploi.
Or, il faut remettre les chiffres à
leur place. Tout d'abord, ce déficit ne représente que 1,5 %
de la dette publique française, et ce en plein contexte de chômage
galopant. Par ailleurs, les chiffres avancés par le Medef ne
reposent en fait que sur des valeurs relatives et des calculs
prévisionnels : si l'on ne prenait que le rapport cotisations
perçues/indemnités versées, le résultat serait légèrement
bénéficiaire, d'un peu plus de 2 milliards d'euros.
En revanche, il est des réalités bien
tangibles
qui provoquent un réel « manque à gagner » :
- la décision par l’État en 2008 d'assigner 10 % des fonds de l’Unedic au « budget de fonctionnement » de Pôle emploi (locaux, salaires, etc.)
- le financement et la multiplication des contrats précaires courts. Par exemple, quand une entreprise utilise plusieurs contrats courts sur un même poste, c'est l'Unedic qui paye les entre-deux
- l’augmentation des exonérations de cotisations, de 1,8 milliard d’euros en 1991 à près de 30 milliards aujourd’hui
- la fraude sociale des employeurs évaluée à 20 milliards
- la multiplication des ruptures conventionnelles des « seniors », sous la forme d'une « préretraite » payée par l'Unedic...
- la non-réintégration des salarié.es dont le licenciement a été jugé nul ou sans cause réelle et sérieuse
- les inégalités de salaire hommes/femmes (une égalité salariale permettrait un équilibre automatique de l'Unedic par l'augmentation mécanique des cotisations).
De « l’assistanat » et
des « chômeur.euses privilégié.es »
Aujourd'hui, il y a en France environ
six millions de demandeur.euses d'emploi, dont à peine la
moitié sont indemnisé.es : celles et ceux qui n'ont jamais ou
pas assez travaillé pour ouvrir des droits, ou qui sont en
formation, ne perçoivent pas d'allocations chômage. De plus, 70 %
des allocataires touchent une allocation pendant moins d'un an.
Le montant d'allocation moyen pour les
2,7 millions d’indem-nisé.es est de 1 119 euros
brut/mois, et la moitié des indemnisé.es touchent moins de
1000 euros brut/mois !
Lorsque l'indemnisation s'arrête, ne
reste plus que l’ASS (allocation de solidarité spécifique),
487 euros/mois maximum (350 000 personnes), et
accessible sous certaines conditions, ou le RSA (524 euros)
financé par les départements avec une compensation incomplète de
l'État et versé par la CAF (2,5 millions de personnes). À
toute fin utile, rappelons que, selon l'Insee, le seuil de pauvreté
en France est de 1 000 euros/personne…
Les gouvernements de tous bords,
relayés par les médias dominants, n'ont de cesse de stigmatiser
scandaleusement les privé.es d'emploi comme fainéant.es, et de les
culpabiliser comme « assisté.es », comme si être au
chômage était une situation confortable, comme si c'était un
choix. La stratégie est de dresser les travailleur.euses, qu'ils
aient ou non un emploi, les un.es contre les autres, les isoler, les
effrayer, afin de briser toute organisation collective et toute
solidarité.
Le chiffon rouge des « intermittent.es
»
Le Medef, et certains syndicats dits
« réformistes » déjà cités, n'ont de cesse de pointer
du doigt et de remettre en cause les annexes 8 et 10 dont
dépendent les travailleur-euses du spectacle, en les présentant
comme démesurément déficitaires... Mais, en fait, le déficit des
annexes 8 et 10 n’existe tout simplement pas. Il s'agit d'une
manipulation des chiffres et de données qui ne sont en fait pas
comparables, et cela a été démontré clairement, depuis des
années, par des chercheur.euses et des économistes. C'est un pur et
simple mensonge.
Ensuite, les intermittent.es
représentent seulement 3,5 % des allocataires pour 3,4 % des
dépenses. Enfin, ce sont les employeurs qui utilisent abusivement un
grand nombre de CDD d'usage relevant de l'intermittence pour des
postes qui pourraient relever du CDI. Et l'État, les collectivités
locales et les entreprises publiques (télévision et radio, par
exemple) ne sont pas en reste de ce point de vue. Enfin, les
conditions d'accès au régime intermittent s'étant durcies depuis
dix ans, de moins en moins de personnes arrivent à y accéder
et donc n'ont aucune indemnité.
Le Medef souhaite vider les annexes 8
et 10 de leur substance pour les faire correspondre au régime
général, non pas pour renflouer les caisses de l'Unedic, mais pour
priver d'indemnisation des milliers de travailleur.euses du spectacle
et ainsi faire baisser les chiffres du chômage et exclure des
milliers de personnes du principe de solidarité
interprofessionnelle. Depuis plus de dix ans, ces annexes sont
devenues un enjeu symbolique, et les intermittent.es un foyer de
résistance insupportable pour les puissants.
Il s'agit tout simplement d'un choix
idéologique : à terme, le rêve du patronat serait de détruire
complètement le système de solidarité que nous connaissons tous
actuellement et qui repose sur le principe du salaire socialisé,
pour tendre vers un système de caisses privées, où chacun.e cotise
pour son propre compte, si tant est qu’il/elle en a les moyens.
C'est à dire un système fait par les riches, pour les riches.
Socialisation du salaire
À l'origine, le financement de la
Sécurité sociale, tout comme celui de l’Unedic, repose sur les
cotisations sociales salariales et celles dites patronales : ce
qu'on appelle le salaire socialisé.
Sur une fiche de paie, une partie du
salaire est payée individuellement au/à la salarié.e, c’est le
salaire net (ou salaire direct). L’autre partie, formée de
cotisations sociales, est versée dans les différentes caisses
(Sécurité sociale, etc.) : le salaire socialisé.
Mais, au fil des décennies, le
développement de l'idéologie libérale a eu pour conséquence un
glissement sémantique : le salaire socialisé est devenu
« cotisation sociale », puis « charges ». Une
même réalité en vérité, mais dans les mots, une façon de
tromper le/la salarié.e en lui faisant croire que ce qui lui
appartient de droit est devenu une « charge » pour lui
comme pour l'employeur.
La cotisation sociale fait donc partie
intégrante du salaire. Réduire la cotisation sociale, au prétexte
de soulager les « charges » de l’entreprise, c’est
réduire le salaire ! Elle n’est pas un prélèvement, ni un
impôt, ni une taxe, ni une épar-gne, ni une assurance, mais bien
une partie du salaire !
Le salaire socialisé permet la
reconnaissance sociale de toutes les situations des travailleur.euses
et ainsi de prendre en compte tous les aléas de la vie de ces
personnes, qu’elles soient actives, précaires, chômeuses ou
retraitées.
Le principe en est simple : les
richesses sont produites par les travailleur.euses, et la cotisation
permet de socia-liser cette richesse pour que toutes et tous touchent
un salaire (et pas une aumône) quelle que soit leur situation sur le
marché du travail. Car ce sont bien les patrons qui sont
responsables de ce « marché du travail », entre
précarité, licenciements, etc.
La CNT revendique dès à présent :
- un accès aux indemnités de chômage sans condition, sans dégressivité et sans durée limite, avec un taux de remplacement à 100 % du meilleur salaire
- une augmentation significative des salaires ;
- le rétablissement du droit à l’allocation chômage en cas de démission ;
- la suppression de la rupture conventionnelle et l'obligation de réintégration en cas de licenciement jugé nul ou sans cause réelle et sociale ;
- un arrêt des exonérations de cotisations sociales patronales et leur augmentation ;
- un arrêt des radiations et du flicage des travailleur.euses privé.es d’emploi ;
- le retour aux annexes 8 et 10 d'avant 2003 et leur extension à tous les salarié.es ;
- la gestion des caisses par les salarié.es eux-mêmes, selon le modèle existant avant les ordonnances de 1967 (qui ont introduit le paritarisme syndicats/patronat).
Construire un autre futur...
Ces revendications ne sont pas une fin
en soi. Car derrière la question de l'assurance chômage, c'est la
propriété privée des moyens de production, donc le salariat et le
pouvoir du capital, de la marchandise et de l’État sur la vie même
qu'il faut remettre en cause.
La CNT prône un anarchosyndicalisme et
un syndicalisme révolutionnaire de transformation sociale. Une
société en rupture avec le capitalisme !
Pour la CNT, le rapport de force doit
se faire par la mobilisation de tous et de toutes, en s’organisant
dès aujourd'hui dans les syndicats, outil social et économique
appartenant aux travailleur.euses et non aux bureaucrates. Le
communisme libertaire, projet révolutionnaire porté par la CNT,
fondé sur la socialisation et l’autogestion des moyens de
production, et la répartition des richesses produites par ceux et
celles qui travaillent, est une urgence sociale, politique,
économique et écologique. N'attendons pas pour cons-truire cet
autre futur sans domination ni exploitation !
Ni loi travail, ni assurance chômage
au rabais,
Contre le chômage et la précarité,
imposons une
véritable sécurité sociale !
CONSTRUISONS LA GRÈVE GÉNÉRALE !
Tract de la Fédération communication-culture-spectacle de la CNT
33, rue des Vignoles, 75020 Paris,
presse.rp[@]cnt-f.org - www.cnt-f.org/sipm/
Tel. : 0695456762
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